Ma relation avec Brokeback Mountain, et maintenant ?

A mon avis, la nouvelle est plus réaliste dans la description des héros.
Si vous connaissez Annie Proulx au travers d'autres écrits, vous vous apercevrez que ces héros sont souvent des détraqués de la vie, des gens ordinaires qui en chient pour vivre.
L'histoire est plus plausible avec des cow boys sales et crottés, pauvres, peu instruits. La galère est d'autant plus grande qu'on les imaginent encore moins en train de se séduire, de se convoiter, de s'aimer, au point, pour l'un d'eux, de souhaiter créer un "foyer" durable où le sentiment d'amour s'unirait au désir de la chair, au plaisir des sens.
Le film nous a montré des héros "beaux" dans lesquels nous avions envie de nous retrouver. Mais le film nous a offert aussi d'autres personnages qui sont venus compléter leurs vies. Personnages créés de toute pièce dans le scénario. Je dois reconnaître qu'ils "donnent à voir" et qu'ils manquent un peu dans la nouvelle.
Cathy, les filles d'Ennis, le beau père de Jack, Randall le futur amant de Jack, et j'en oublie sûrement...

C'est sur que des hommes beaux comme Health et Jake ne courent pas les rues!
Les autres personnages apportent un côté encore plus ambigu et dramatique au film mais j'ai aimé le coté sauvage, fataliste, brutal presque animal mais finalement tellement emprunt d'amour de ces 2 cows boys de la nouvelle.

j'ai eu du mal à la permière lecture de cette nouvelle, elle m'a laissée un goût amer dans la bouche, je n'arrivai pas à "imaginer", jack et ennis comme décrit par annie proulx, ils me choquaient... les mots étaient trop durs, trop rudes, rien ne laissait place à l'imaginaire... il m'a fallu plusieurs heures avant de "digérer" la nouvelle que j'ai relue 2 ou 3 jours après, et encore une fois ou deux avant de m'en imprégner vraiment, de comprendre le sens caché de certains mots, de certaines phrases.

Je reste persuadée que si les deux acteurs principaux n'avaient pas été beaux, le film n'aurait pas attiré autant de monde... il fallait un choc visuel et que les personnages soient crédibles pour le spectateur... là Ang Lee a fait fort, très fort .... pour la construction du scénario aussi bien sur, tous les personnages secondaires étoffent et donnent du relief à cette magnifique histoire ;-))

Bon, c'est vrai aussi que le phnénomène ne touche pas que les hisoires d'amour homos à l'écran. des actrices ou acteurs aux physiques " ordinaires " jouant les Roméo et Juliette, ce n'est pas " bankable ".. comme ils disent..
Ang Lee a déjà pris le risque d'adapter une nouvelle casse gueule .. si en plus il avait choisi des acteurs cageots.Il allait droit dans le mur financièrement ! il faut comprendre !
Alors c'est vrai que de retropuver Ennis et Jack, dents de cheval et jambes grèles.. ça peut choquer au début, moi, j'ai essayé de me laisser porter par les mots..Violents, coupants comme le rasoir.Mais c'est vrai que commencer par le film, et terminer par la nouvelle, ce n'est peut-être pas l'idéal, on a déjà les images dans la tête..
Quand on lit d'abord un livre, on se fait son propre film, avec les mots qui nous sont donnés, là..Ang Lee a déjà ( très bien) fait le job.. ça fausse un opeu.Alors forcément, on est un peu choqués par la vision de l'écrivain.
Quelqu'un sait ce que Annie Proulx a pensé du film ?

J'avais trouvé des trucs au moment où je découvrais le film, où je m'intéressais à lui et où je cherchais partout, sur Internet, tout ce qu'on pouvait écrire sur son sujet.
Je me souviens approximativement d'une phrase qu'elle avait dite, du style, "J'ai créé Jack Twist et Ennis del Mar, ils ne m'appartiennent plus, faites-en ce que vous en voulez, faîtes-les vous, vôtres..."

Je ne crois pas qu'elle se soit offusquée de la différence qu'il y a pu avoir entre son œuvre et le film. Si différence, il y a. A mon sens, l'histoire est respectée.

L'interprétation est conforme. C'est vrai, le scénario a étoffé des personnages à peine esquissés dans la nouvelle. Mais encore une fois, c'est pour "nous donner à voir". Comme tu le soulignes, dans un livre, on imagine des visages, des lieux, dans le film on n'a pas cet "effort" d'imagination à faire, puisque les images existent, elles sont là sur l'écran.

Le film (et parfois la nouvelle) pêche sur des détails mais presque sans importance par rapport au discours que veut nous transmettre l'histoire.
- le soir de la scène d'amour, ils crèvent de froid. Le lendemain, Jack est torse nu sous la toile.
- Ennis n'a presque rien comme vêtements, un tout petit sac, or on le voit avec plein de tenues différentes. Le jour du retour, au comptage des moutons, il porte même un ciré jaune.
- on ne les voit jamais s'occuper de donner à manger aux chiens, aux chevaux, aux mules. Or je pense que c'est un travail non négligeable.
- la neige qui "n'a tenu qu'une heure", vu l'épaisseur, il y a du y avoir un profond changement climatique !
Et j'en oublie.

Mais bon, j'arrive à ne pas y penser par rapport à la grandeur du sujet.
Bises, Germain

Trouvé ça : (une interview d'Annie Proulx, en anglais pour laquelle j'ai cliqué sur "traduction" donc pardon pour les approximations)

Larry McMurtry et Diana Ossana ont préparé le scénario de Brokeback. Avez-vous travaillé avec eux à sur ce point, ou il a été complètement entre leurs mains ?

Il était entre leurs mains. Diana m'a appelé un jour et nous avons parlé pendant quelques heures au téléphone. Je suis à peu près restée hors de lui. Principalement parce que j'étais occupée à autre chose, et parce que je ne suis pas une personne de film. Je ne suis pas scénariste. Il ya certains rythmes et certaine forme à l'écran qui sont juste différentes de courtes histoires ou des romans.

Je sais assez pour ne pas aller en butée en plus, je déteste vraiment la tendance que beaucoup d'écrivains ont quand leurs trucs sont fabriqués dans un film, qu'ils sont là, ils veulent tout faire. Ils veulent diriger, ils veulent choisir les acteurs, qu'ils veulent faire le scénario - ils veulent juste prendre le contrôle. Et, J'ai très bien compris que ce n'est pas une bonne chose, parce que c'est différent.

Vous avez répondu à certaines de mes questions précédentes, lorsque vous avez parlé d'adapter un roman pour un film, dans lequel vous devez couper, et une histoire courte, qui doit être évacuée. J'ai un ami qui est allé au Festival du film de Toronto et a vu Brokeback Mountain, et elle aimait la façon dont certaines parties ont été remplis pour faire une longueur reportage.

Eh bien, je l'ai aimé, aussi. Je crois que ce qu'ils ont fait était assez merveilleux. Il a réellement enrichi l'histoire. Au lieu d'un petit canot, il est devenu un paquebot.

J'ai aussi pensé que c'était intéressant quand vous parliez de Lee Ang le traitement de votre histoire, comment il a apporté le sérieux nécessaire à l'histoire.

Tout a fait.

Êtes-vous surprise que cette histoire en particulier ait reçue autant d'attention ?

Oui. Je le suis. Surtout huit ans après qu'il a été écrit. C'est parce que le film est très important dans notre culture, l'image en mouvement est dominante. Et pour de nombreux écrivains, aussi, c'est seulement valable si elle est faite dans un film. C'est juste la façon d'être du moment.

Donc, oui, je suis surprise.

Vous avez dit que vous étiez satisfaite de la performance de Heath Ledger. Avez-vous ressenti de cette façon l'ensemble du casting ?

L'ensemble du casting est magnifique. Il n'y avait rien pour ne pas être heureux, dans l'exécution de quiconque. Ils ont tous été extraordinaires. Et en distinguant Heath Ledger, je ne voulais pas alléger Jake Gyllenhaal dans le moins, parce qu'il s'agit d'une prestation hors du commun, acteur accompli. Vraiment, tout à fait merveilleux. Et je pense qu'il est passé de Brokeback de Jarhead, et c'est le genre de saut qui est, comme, "Oh, vraiment ?" Et qu'il l'a fait avec facilité.

Tous les acteurs ont été tout simplement superbes.

Merci à tous pour ces précisions
visiblement, l'auteure a su lacher prise, c'est assez courageux je trouve, en général, les écrivains détestent laisser leur " bébé" dans les mains des autres.
C'est vrai que le résultat des différent de la nouvelle, sans tromper le fond.